La myopie connaît une progression alarmante en France comme partout dans le monde. Ce trouble visuel, qui rend la vision floue de loin, touche aujourd’hui environ 27 millions de Français. Les spécialistes parlent désormais d’une véritable épidémie qui nécessite une prise en charge adaptée et des mesures préventives efficaces. Étudions les causes, les risques et les solutions pour enrayer cette progression inquiétante.
L’augmentation inquiétante de la myopie en France et dans le monde
Les chiffres concernant la progression de la myopie en France sont préoccupants. La prévalence est passée de 15% en 1950 à 40% en 2020, avec des projections atteignant 60% d’ici 2050. Une étude menée sur les données de 696 opticiens en France métropolitaine entre 2013 et 2018 révèle que 44,14% de la population adulte française serait touchée, avec une proportion plus importante chez les femmes (49,22%) que chez les hommes (38,55%).
Cette tendance s’inscrit dans une épidémie mondiale qui touche actuellement 2,6 milliards de personnes. Les projections pour 2050 sont alarmantes, avec près de 5 milliards de myopes attendus, soit 50% de la population mondiale. L’augmentation est particulièrement marquée en Asie du Sud-Est, où 70 à 90% des jeunes de 18 ans sont déjà touchés.
Le tableau ci-dessous illustre la répartition de la myopie selon les régions du monde :
Région | Prévalence actuelle |
---|---|
Asie du Sud-Est | 70-90% |
Europe et Amérique du Nord | ≈ 40% |
Amérique du Sud | ≈ 10% |
Afrique | ≈ 3,5% |
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a d’ailleurs reconnu la myopie comme maladie en 2014, témoignant de l’ampleur du phénomène.
Facteurs de risque et causes de l’épidémie myopique
Si les facteurs génétiques jouent un rôle dans le développement de la myopie, ils ne seraient responsables que de 10% des cas environ. Le risque est d’environ 25% si l’un des parents est myope, et s’élève à 50% lorsque les deux parents le sont.
Les spécialistes s’accordent à dire que les facteurs environnementaux et les modes de vie sont les principaux responsables de cette épidémie. La sollicitation prolongée de la vision de près, combinée à un manque d’exposition à la lumière naturelle, constitue le facteur principal. En France, le temps moyen consacré aux activités sollicitant la vision de près atteint 5h17 en semaine et 6h04 pendant les week-ends.
L’effet protecteur du temps passé à l’extérieur s’explique par plusieurs facteurs :
- La composition du spectre de lumière naturelle (luminosité plus élevée et distribution spectrale plus large)
- Les caractéristiques visuo-spatiales des environnements extérieurs
- La complexité des images en extérieur comparée à celle d’un intérieur
- Un profil d’accommodation différent avec moins de variations
Classification et risques associés à la progression myopique
La myopie se classe selon son degré de sévérité, exprimé en dioptries (D) :
En France, la répartition est la suivante :
- Myopie minime (-0,5 à -2,9 D) : 29,96% de la population
- Myopie modérée (-3 à -5,9 D) : 11,34%
- Myopie forte (entre -6 et -10 D) : 3,44%
- Myopie très forte ( -10 D) : 0,74%
Les risques associés à la myopie forte sont nombreux et peuvent conduire à des déficiences visuelles permanentes. Les personnes atteintes présentent un risque accru de développer un décollement de rétine (risque multiplié par 4 pour une myopie de -1 à -3 D, et par 10 au-delà de -3 D), un glaucome, une cataracte ou une maculopathie myopique.
Sans stratégie de lutte efficace, on estime que le nombre de personnes souffrant de déficience visuelle due à la dégénérescence maculaire myopique atteindra 55,7 millions d’ici 2050.
Stratégies pour freiner l’épidémie de myopie
Face à cette augmentation préoccupante de la myopie en France, plusieurs approches préventives et thérapeutiques existent :
Le dépistage précoce est fondamental. Il est recommandé dès l’âge de 6 mois, puis à 3 et 6 ans, et ensuite tous les deux ans. Pour les enfants dont les deux parents sont myopes, un examen dès l’âge de 5 ans est conseillé.
Pour prévenir l’apparition et ralentir la progression de la myopie, plusieurs mesures environnementales sont efficaces : favoriser les activités extérieures quotidiennes, faire des pauses régulières lors du travail de près, limiter le temps d’écran à 2h par jour et maintenir une distance appropriée avec les supports de lecture.
Des solutions thérapeutiques existent également pour freiner l’évolution myopique : l’orthokératologie (lentilles rigides portées la nuit), l’atropine à faible dose (seul traitement pris en charge par la sécurité sociale) et les verres freinateurs de nouvelle génération.
Certains pays, comme la Chine, ont déjà mis en place des politiques actives de lutte contre la myopie. En France, la création de l’Institut de la myopie pathologique témoigne d’une prise de conscience croissante face à ce problème de santé publique majeur.